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joignit a l'orage pour me tourmenter. On n'avait cessé tout le jour d'apporter dans nos chambres mille effets de diverses sortes qui n'avaient pu etre rangés à mesure. Lorsque l'orage vint donner du mouvement au vaisseau, la faience, les paquets, les boites ecc furent culbutés et roulerent ça et là de tous cotés: je me levai pour sauver quelques porcelaines, peu accoutumée à marcher dans une chambre mouvante, je heurlai une table mal assujettie, je la renversai, preter à tomber moi-meme, je ne pus qu'avec peine regagner mon lit ou je fus forcée de rester spectatrice du désordre, sans pouvoir y rien opposer que la patience. Comme tous finit, l'orage cessa, le jour ramena le beau tems, et l'on put enfin tout mettre en place.
J'eus dans cette journrée une autre alerte, un corsaire algérien fut apercu, courant d'abord sur nous toutes voilure; comme on ne put pas juger de sa force, tant qu'il fut à une certaine distance mais mon imagination le devanca et me représentait déjà l'idee d'un combat dans lequel nous pouvienne succomber etre prise, emmenés en esclavage et que sais-je?Tandis que je roulais dans ma tete ces affreuses penseé, le corsaire s'approchait toujours ; enfin, on levit changer de route. Il n'était heuresement pas de force à attaquer l'Uranie , que ses canons rendent respectables.
Ne sortant pas de notre appartement, ma présence ne fut connue que le lendemain ; mais Louis, desirant me présenter lui-meme aux officiers, les invita à prendre du thé chez lui le soir. J'en fis les honneurs. J'avais repris les habits de mon sexe: nous rimes un peu, avec ces messieurs, des conjectures que chacun avait faites, ceux-là d'après un indice, ceux-çi d'après un autre; mais aucun d'eux n'avait fait